Liliane Nataf, une artiste engagée sur son territoire
Liliane est comédienne et metteur en scène depuis plus d’une quarantaine d’années. En 2012, elle participe à la création de la Bande à Godot, une compagnie de théâtre qui travaille avec les habitants de quartiers prioritaires parisiens : Goutte d’Or, Porte Montmartre, Porte des Poissonniers, et Riquet Stalingrad. C’est en répondant à un appel projet du CentQuatre que la troupe commence à animer des ateliers dans ce dernier secteur.
Auparavant, au début des années 1990, elle travaille durant dix ans au sein du centre dramatique national de Lille, où elle anime des ateliers de pratique théâtrale, entre autres missions de relations avec les publics. Elle y crée un spectacle dont la caractéristique principale est de pouvoir être représenté n’importe où, comme dans des maisons de quartier, des hôpitaux, des centres, etc. Cette pièce de théâtre, adaptation de trois romans autobiographiques d’Albertine Sarrazin, se joue alors durant deux années. Cette expérience qui la confronte avec les habitants en difficulté de différents quartiers lillois, lui permet de réaliser à quel point le théâtre a le pouvoir de rassembler, et de soutenir moralement.
En arrivant à Paris dans le quartier de la Goutte d’Or, elle décide de monter une compagnie de théâtre en collaboration avec d’autres comédiens, metteurs en scène, et musiciens. Le nom « la Bande à Godot » se forme alors d’une double allusion à la pièce de Samuel Beckett « En attendant Godot » et à la bande de anarchiste Jules Bonnot.
BAG, une association culturelle parisienne
Aujourd’hui, BAG développe des spectacles professionnels comme « La journée du fils » de Vincent Farasse, ou « 1 kg de plumes » inspiré de « la Bonne âme de Se-Tchouan » de Bertolt Brecht.
Dans le cadre associatif elle propose un atelier annuel qui se déroule chaque semaine alternativement au CentQuatre, dans les locaux de l’EVS Riquet Stalingrad ou à la cité Traeger. Ces ateliers invitent les participants à travailler sur leur prise de parole en public, leur élocution en français, la respiration, le placement de la voix, et sur la préparation à l’entretien d’embauche.
« Les tics corporels n’échappent pas aux recruteurs, alors que souvent ils sont fait de manière inconsciente. » – LN
Liliane nous explique que le théâtre permet de mieux se connaitre soi-même, et de prendre conscience de son langage corporel. La pratique théâtrale facilite aussi la communication avec les autres, en donnant les codes de la communication non verbale. Par exemple en France, regarder dans les yeux en parlant est nécessaire pour instaurer de la confiance, alors que dans une autre culture, baisser le regard est une forme de respect.
La BAG met également en place des stages de cinq mois gratuits qui commencent en juillet. Ils sont à destination de personnes qui ne partent pas en vacances ; enfants et parents peuvent participer ensemble à cette activité.
Enfin, l’association propose des ateliers de création de court-métrage pour des jeunes, qui sont à la fois interprètes, auteurs caméramans, et réalisateurs.
Naïma Richecoeur, un soutien aux bénéficiaires
Responsable des relations avec les publics, médiatrice, et relais insertion, Naïma accompagne au quotidien les adhérents de BAG dans leurs démarches administratives, dans leurs recherches de formations et d’emploi.
Dans le cadre d’un échange inter-associatif mis en place entre VEMT et BAG, elle anime également des formations au numérique et des ateliers de français et langues étrangères (FLE) débutant auprès des bénéficiaires de VEMT. Les participants aux ateliers FLE bénéficient également d’ateliers phonétiques spécialement conçus pour eux par BAG.
Les représentations des ateliers
Chaque année, naissent deux spectacles : l’un est issu des stages d’été, et l’autre de l’atelier annuel. Ils se jouent dans les quartiers où intervient l’association et en extérieur devant des habitants. Les participants aux ateliers sont alors confrontés au public, et parfois il leur faut plusieurs années avant de franchir ce cap. Les ateliers menés dans les différents quartiers incitent aussi les participants à sortir de leur environnement pour aller dans un autre cadre.
« Les participants viennent de plusieurs quartiers politiques de la ville, parce qu’Il nous semble important de ne pas créer de frontières. Cette année nous abordons le thème des espaces publics. Les participants découvrent les points communs de leur quotidien dans ces différents secteurs, et peuvent ainsi échanger et partager leurs expériences. » – LN
Une attache avec le quartier Riquet Stalingrad
Liliane apprécie particulièrement ce quartier où elle constate une forme de collaboration inter-associative, notamment avec l’équipe de l’EVS, le CentQuatre, le centre social CAF Tanger et le centre social Riquet.
« Nous sommes voisins » est un documentaire-fiction, réalisé en 2021, dans lequel les habitants de la rue Paul-Laurent et de la rue du Maroc montrent et témoignent d’une réelle solidarité et d’une profonde appartenance à leur quartier.
« Ce quartier, c’est comme un village ! Il y a une grande richesse culturelle et cette mixité nous apprend plein de choses. » – LN
Propos recueillis par Johana Fairfort – Art K Diff